La magie a toujours été présente dans les diverses civilisations d'Illergan, même chez les plus primitives tels les peuples tribaux.
La base de la magie, c'est cette réserve de mana que la plupart des organismes vivants produisent naturellement. Chez certaines créatures, cette réserve s'est développée d'elle-même au fil de l'évolution de l'être et agit à la manière d'un instinct, ce qui ne l'empêche pas d'avoir des effets spectaculaires. Mais certaines espèces, par exemple l'humain, ont de prime abord acquis une certaine intelligence, tout à fait indépendante de la magie, qui leur a par la suite permis d'appréhender cette science étrange. Les espèces les plus évoluées savent maintenant comment augmenter cette réserve de mana : ce n'est qu'une question d'entraînement et de volonté, une discipline mentale des plus ardues mais, finalement, guère plus qu'une autre science.
A ce propos, la magie peut être vue comme un frein à l'avancée des autres sciences, notamment dans les domaines mécaniques, biologiques, et ainsi de suite. C'est un fait incontestable. Les chercheurs de ce monde sont en effet tous (ou presque) des mages de haut niveau qui tentent d'appréhender les rouages complexes des arcanes. Les découvertes majeures sur ces mécanismes fondamentaux sont extrêmement rares, en revanche des sorts de plus en plus puissants et de mieux en mieux optimisés en terme de dépense de mana sont régulièrement mis au point par ces hauts mages. Évidemment, ils ont tendance à les garder pour eux ou à les réserver à des élites.
Aussi, comment fonctionne cette science nommée "magie" ? Il faut l'appréhender comme une énergie - le mana - capable, selon sa quantité, sa direction et pléthore d'autres paramètres spécifiques à elle seule, non pas de modifier la matière "comme par magie" mais d'accélérer et d'amplifier n'importe quel processus naturel dans une zone espace-temps bien définie. Prenons l'exemple d'un sort de soin : le processus de régénération du corps est, pendant quelques secondes, mis dans une boîte spatio-temporelle hermétique au reste de la réalité, le processus est alors accéléré et débarrassé de toutes les contraintes telles que les micro-organismes, la perte de sang ou encore les signaux de détresse envoyés par le cerveau. Ce mana est également capable de mimer de la matière telle qu'une créature ou une flamme : elle devient vraiment cette matière sur le plan physique, mais pour une durée généralement courte car la stabiliser est fort complexe. Dans le cas d'un sort de projection, le mana est projeté vers une cible selon des paramètres qui font qu'elle se mue en chemin en la matière désirée. Évidemment, il est tout à fait possible de former d'abord l'objet puis de le projeter, mais cela nécessite alors de trouver un autre élément sur lequel agir (par exemple le vent), ce qui a tendance à être plus manavore.
Il existe donc maintes façons d'appréhender la magie, c'est d'ailleurs la raison pour laquelle il en existe plusieurs types : la Yarlysy base une partie de ses sorts sur la transformation de mana en flammes et la Vaephyr sur les changements d'état de l'eau. Toutes ces formes de contrôle sont valables et, d'ailleurs, les plus grands mages en maîtrisent une multitude.
Prenons un exemple détaillé avec l'un des sorts de base de la Nécromancie. Il s'agit d'une magie particulièrement technique dont la conception des sorts a demandé (et demande encore) beaucoup d'expériences macabres et absolument dégoûtantes. Dans un sort classique de réanimation de cadavre, le mana doit être absorbé par la moelle épinière de la cible et envoie par la suite des signaux électriques de manière à faire bouger la cible selon la volonté du mage. Cette méthode ne fonctionne que parce que le mana est plus ou moins libéré du temps, ce qui lui permet de gérer les multiples mouvements simultanés. Le créateur du sort, à force d'essais et d'études anatomiques, a finalement réussi à programmer le mana pour chaque mouvement de base d'un corps. Les zombies ont donc une démarche quelque peu saccadée mais ils peuvent tout de même être très utiles.
Autre exemple avec un sort d'altération visant à empoisonner des cibles : une toute petite quantité de mana jaillit depuis le mage jusqu'au cœur de chaque cible tout en formant un mince fil de mana entre les deux. Le mage peut alors, à tout moment, transformer la petite quantité de mana présente dans le cœur en une substance plus ou moins nocive et la libérer dans le sang. Cela peut être un surplus de globules rouges ou bien un lymphocyte corrompu, mais le fait est que le mage n'a pas besoin de le savoir : il connaît les paramètres à appliquer au mana pour obtenir l'effet escompté. Celui qui a conçu le sort, en revanche, a dû tenter maintes expériences hasardeuses jusqu'à obtenir cet effet auquel il ne s'attendait pas nécessairement au vu de ses connaissances en biologie. Il est également possible de concevoir un sort à partir de connaissances concrètes et complexes, mais cela demande bien plus de recherches puisqu'il faut alors se plonger dans les sciences classiques, matières peu explorées dans les Mondes connus.
Seconde composante de la magie, la Volonté est tout d'abord la capacité d'un individu à s'imposer des actions ou non-actions qui ne lui sont pas agréables mais c'est aussi la seule force capable de s'opposer au mana, en dehors du mana lui-même bien entendu. Sa particularité est de ne nécessiter aucune connaissance en magie, car il s'agit d'un instinct bien plus que d'un art. Elle demande de l'entraînement bien sûr, mais pas du tout du même type que celui imposé aux pratiquants des arcanes. Son fonctionnement est simple : lorsque l'organisme de l'individu détecte du mana parasite, ou lorsque l'un de ses sens l'avertit d'un danger magique, la volonté s’attelle alors à annuler les effets du sorts. Concrètement, elle peut tout simplement obliger le mana à retourner à son état originel, c'est ainsi que n'importe quelle créature peut faire disparaître une boule de feu ou une armure invoquée, avec plus ou moins de facilité. La volonté n'est pas totalement consciente, et heureusement car elle ne serait guère efficace sinon. Notre inconscient assimile en effet bien plus d'informations sur notre environnement que nous ne pouvons en retenir sciemment, et la volonté y a accès pour nous protéger.
Pour finir, abordons le cas des sorts inaltérables par la volonté. Cela est possible quand le mana ne se transforme pas lui-même en matière mais agit sur elle via un intermédiaire : par exemple en modifiant des paramètres climatiques pour créer une tornade, en participant au premier acte élémentaire d'une réaction en chaîne, ou encore en modifiant la température de l'air autour d'un objet. Dans ces cas-là, la volonté ne trouve pas de mana dans le phénomène ou l'objet qui nous menace et reste donc impuissante.
"Vulgarisation arcanique" par Zaniom Archiis, Arcaniste-chercheur émérite d'Orica mort en l'an 514 du Troisième Âge.